Le 25 janvier, la Ginga Choreo était au cœur d’un moment dansé unique où féminité, élégance et inclusion se sont rencontrées. La Ginga est l’art du mouvement sensuel et fluide des hanches – une forme d’expression qui capte l’essence même de ce que signifie se sentir libre et féminine. Cette technique, propre aux suiveuses dans la danse Kizomba, trouve son origine en Angola et a été réinventée à Paris par des danseurs d’origine africaine. Il y a quinze ans, DanceOrientation (alors appelée Etage Tropical) a joué un rôle clé dans l’introduction et la diffusion de ce style de danse en Belgique. Depuis, nous n’avons cessé de grandir et nous sommes aujourd’hui particulièrement fiers d’avoir rendu cette danse accessible à tous – y compris aux personnes malvoyantes ou aveugles.
La session du 25 janvier fut une célébration de la féminité sous toutes ses formes. Nous voulions mettre en lumière la force et la beauté de chaque femme, en accordant une attention particulière aux danseuses ayant une déficience visuelle. Car la féminité ne connaît aucune limite. En parallèle, une session de Menstyling avait lieu, durant laquelle les danseurs masculins ont travaillé sur leur style personnel et leur expression. Ces deux trajectoires étaient indépendantes de la danse en couple et visaient une formation individuelle, permettant à chaque participant de renforcer son propre langage corporel. Parmi les participants, nous avons compté cinq danseurs avec une déficience visuelle. Quatre femmes ont participé à la chorégraphie dans un groupe d’environ 20 à 25 femmes, tandis qu’un danseur aveugle a rejoint la session Menstyling. Au total, notre organisation compte 24 membres ayant une déficience visuelle, mais comme dans toute école de danse, tout le monde n’est pas toujours présent.
Pour rendre cette session accessible à tous, nous avons utilisé nos outils habituels. Une corde fixée au sol avec du ruban adhésif a permis aux danseurs de s’orienter dans leurs mouvements. La barre de ballet, soigneusement placée dans la direction de la chorégraphie, offrait un soutien et une structure supplémentaires. Nous avons également utilisé des outils tactiles et visuels comme des tableaux magnétiques et des cartes de pas – des moyens qui rendent l’apprentissage tangible, ludique et efficace. La chorégraphie a été enseignée pas à pas dans une formation claire, le groupe dansant les uns derrière les autres et côte à côte. Lors des enregistrements, nous avons commencé visuellement par les pieds, ensuite la ligne d’orientation est apparue à l’écran, puis la barre de ballet, et enfin le groupe dansant en harmonie. Chaque élément – du ruban à la carte – était un véritable outil de danse faisant toute la différence.
Nous avons volontairement donné la parole à deux femmes avec une déficience visuelle. Madina, une femme francophone d’origine burundaise, suit nos cours avec passion depuis deux ans. Son élégance et son lien chaleureux avec l’école ont marqué les esprits, et son amour de la danse était perceptible dans chacun de ses mouvements. Nadine, également une danseuse fidèle, a montré avec aisance comment elle utilise nos outils. Elle a expliqué l’utilisation du tableau magnétique et des cartes de pas, et a démontré comment ces outils l’aident à comprendre et ressentir les chorégraphies, même sans la vue. Pendant la danse, les deux femmes ont tenu brièvement les cartes en main, sur lesquelles la caméra a pu faire un zoom, suivi d’un plan panoramique du groupe en train de danser. La corde et la barre ont également reçu l’attention visuelle qu’elles méritaient, en tant qu’accompagnateurs silencieux mais essentiels du processus dansé.
L’ambiance ce jour-là était festive et chaleureuse. Toutes les danseuses étaient habillées avec élégance et festivité, et certaines femmes aveugles ont été maquillées avec soin. Nous avons choisi de filmer dans notre grande salle de danse, où des spots colorés ont créé une atmosphère intime et chaleureuse – un décor parfaitement adapté au thème de la féminité et de la danse. Les images dégageaient de l’énergie et de la fierté, avec une touche contemporaine qui rendait l’ensemble frais et inspirant.
La réalisation de ce projet n’aurait pas été possible sans le soutien de la Fondation Roi Baudouin. Leur confiance nous a offert non seulement une marge financière, mais surtout une véritable crédibilité. Ce que nous faisions avec conviction depuis des années a enfin été vu et reconnu. Par le passé, nous étions souvent ignorés par les institutions, même si notre public cible nous a toujours soutenus. Nous étions perçus comme innovants, mais cette innovation faisait parfois peur. Grâce à la FRB, nous avons pu briser ce mur. Aujourd’hui, nous recevons des demandes de partout et avons du mal à suivre le rythme. Ce soutien nous a permis de construire et de rendre visible notre image – non seulement pour les voyants, mais aussi pour la communauté des personnes aveugles et malvoyantes. La FRB nous a donné l’opportunité d’ouvrir des portes qui étaient restées jusque-là fermées, et de nous faire connaître d’une manière que nous n’aurions jamais imaginée.
Ce qui est au cœur de notre démarche aujourd’hui, c’est la diffusion de notre savoir et de notre méthodologie. Grâce aux moyens que nous avons reçus, nous sommes en train de numériser notre matériel pédagogique : vidéos, fichiers audio, site web, flyers et cours reçoivent une mise à jour professionnelle. Nous voulons rendre nos outils disponibles en plusieurs langues et continuer à investir dans du matériel pédagogique clair et structuré, accessible à tous. Notre objectif est simple : atteindre, informer et inspirer un maximum de personnes – voyantes ou non, professionnelles ou débutantes, locales ou internationales.
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